En avril 2009, l’Ambassade d’Iran a adressé à diverses associations féministes en France une invitation pour intervenir lors d’un colloque « Contributions of the Islamic World to Women’s Issues and Analysis of the Consequences of Feminism » (Apports du monde musulman à la question des femmes et analyse des conséquences du féminisme) qui se tiendra à Téhéran en juin 2009.
Cette initiative s’inscrit dans une stratégie de longue durée du régime islamique qui essaie de donner une image positive de lui-même et de l’évolution de la situation des femmes en Iran. En invitant des associations féministes en Iran pour analyser les « conséquences du féminisme », probablement « négatives » pour lui, le régime islamique cherche à brouiller les esprits et à promouvoir un féminisme qui s’accommoderait des prescriptions de l’Islam.
En effet, les délégations de ce régime participent aux différents rassemblements internationaux, à côté d’autres états anti-démocratiques, pour faire pencher les valeurs universelles des droits humains dont les droits des femmes vers des droits différenciés selon des critères cultuels et culturels. Durban II en a récemment fourni un exemple significatif. Dans le même temps, les nombreux experts de ce régime avancent des chiffres sur l’évolution positive de l’alphabétisation des femmes et sur la baisse du nombre d’enfants par femmes pour faire croire que le régime islamique d’Iran favorise une libération islamique des femmes. D’ailleurs, la théorisation du féminisme islamique s’est fait et se fait notamment en référence à l’expérience iranienne.
Ce régime islamique qui a imposé le port du voile aux femmes iraniennes dès son instauration en 1979, continue à mener des campagnes autour du voile comme symbole identitaire de « la femme musulmane moderne ». Pour cela, il a même désigné pour les derniers jeux olympiques une femme voilée à la tête des sportives iraniennes, alors qu’à l’intérieur du pays les femmes ne peuvent participer à aucun concours sportif où leur corps est exposé (comme la natation). Un apartheid sexuel frappe le champ sportif à tel point que la présence des femmes est interdite dans les stades, lors des matchs, pour qu’elles ne soient pas en présence d’hommes.
Les discriminations sexistes et les violences faites aux femmes font structurellement partie du système mis en place par la République islamique. Par référence à la Charia, les lois en vigueur sacralisent le sexisme, considèrent les femmes comme la moitié d’un homme et permettent sa chosification, alors que les femmes sont bel et bien présentes dans tous les champs sociaux. Les lois existantes et l’image qu’elles donnent des femmes, ainsi que la répression mise en œuvre envers elles créent des situations dans lesquelles les femmes sont quotidiennement l’objet de mépris, de violences et de multiples discriminations.
Surgi avec force au cours de cette dernière décennie pour revendiquer l’égalité des droits, le mouvement des femmes subit une constante répression. A l’instar du mouvement étudiant et des contestations des ouvriers et des enseignements, les féministes iranien/nes sont arrêté/es, interrogé/es, violenté/es chaque jour par les forces de la police islamique.
Dans le même temps, au moyen de multiples procédés tels que l’appel aux féministes françaises pour contribuer à son colloque, le régime tente de dissimuler sa dimension totalitaire, antidémocratique et anti-féministe.
Nous protestons contre ce simulacre et nous déclarons solidaires du mouvement féministe iranien qui revendique la liberté et l’égalité des droits. Nous demandons la libération immédiate des féministes et des défenseurs des droits humains actuellement en prison, et la fin de la répression exercée sur les mouvements de la société civile afin qu’ils exercent leur droit élémentaire d’exister.
Pour le réseau international de solidarité avec les féministes en Iran
Paris, le 19 mai 2009