Bonsoir, et merci d’organiser cet événement cette nuit. J’espère accueillir Esha à Los Angeles bientôt.
J’ai voulu co mmencer en lisant un poème écrit par Langston Hughes, le poète afro-américain bien co nnu :
Accrochez-vous fort à vos rêves
Car si les rêves meurent
La vie est un oiseau aux ailes brisées
Qui ne sait pas voler
Accrochez-vous fort à vos rêves
Car quand ils s’en vont
La vie est un champ stérile
Gelé par la neige
J’étais dans le train de Toronto à New York quand j’ai reçu un email que Esha était arrêtée.
Alors que j’étais choquée par cette brève nouvelle, une fois de plus, j’ai dû m’accrocher à mon rêve et ne pas le lâcher. Le rêve de vivre dans une société où la liberté académique et la recherche intellectuelle ne soient pas amoindries co mme « une menace à la sécurité nationale ». Ma première ren co ntre avec une absence de liberté académique a eu lieu à l’automne de 1970, mon premier semestre à l’Université de Téhéran, où une des étudiantes de mon co urs a été arrêtée pour l’unique raison d’avoir co ntesté l’absence de liberté de parole et d’expression à l’université. Elle a été exclue de l’université.
Esha, une jeune femme irano-américaine, est partie travailler à sa thèse en Iran malgré le fait que son co nseiller au CSUN l’ai mise en garde co ntre le risque de voyager en Iran.
La curiosité intellectuelle fervente de Esha, sa passion artistique et son besoin de chercher la vérité l’ont amenée à faire le voyage en Iran. La présidente du CSUN, Jolene Koester a eu le co mmentaire bien dirigé que « Qui co nque attache de la valeur à la co nnaissance et au rôle de la recherche académique pour éclairer la co ndition humaine devrait se sentir co ncerné. »
J’ai ren co ntré Esha quand les membres californiens de la « Campagne Un million de signatures » avaient projeté d’avoir un stand au festival culturel iranien, Mehregan, dans le co mté d’Orange en Californie. Elle s’amena co mme une personne gentille et attentive, talentueuse, intelligente et fière de son héritage culturel iranien. J’appris par ses amis qu’elle jouait du Tar, avait étudié le design graphique à l’Université Azad de Téhéran et croyait dans le pouvoir de l’art co mme médium pour renforcer les femmes et les enfants. Pendant qu’elle était étudiante à l’Université Azad de Téhéran, elle enseigna le théâtre à de jeunes enfants de l’orphelinat de Ameneh. Esha a une grand passion pour la paix et l’humanité et son intérêt pour l’égalité de genre provient (ou est dérivé) de son expérience personnelle et les défis que les femmes ren co ntrent en Iran.
Pour sa thèse de licence, Esha espérait faire un documentaire saisissant les histoires de jeunes femmes impliquées dans la «Campagne Un million de signatures » et fournir à sa co mmunauté académique une image assez co mplète et co mplexe des femmes iraniennes. Elle a écrit un blog où elle a décrit ses impressions en co llectant des signatures pour la «Campagne Un million de signatures » au festival Mehregan dans le co mté d’orange en Californie.
L’arrestation inattendue de Esra Momeni n’est pas un cas isolé. Beau co up de femmes iraniennes et leurs alliés masculins qui soutiennent l’éradication de toutes les lois discriminatoires en Iran, qui luttent pour mettre fin aux lapidations et autre formes de violence co ntre les femmes organisées par l’état, qui défendent les droits humains et la dignité pour tous en Iran, ont été arrêtés à un rythme accéléré, surtout les deux dernières années. La fermeture récente du bureau du Défenseur des droits humains et le harcèlement subi par Shirin Ebadi, qui a co nnu les grands titres internationaux font aussi partie de la vague récente de pressions que subissent les militants des droits. La campagne pour l’égalité est un des mouvements de femmes le plus stimulant dans le monde d’aujourd’hui. Pour la première fois, un mouvement diversifié et global a été créé pour exercer ses droits et ses responsabilités civils et réclamer son espace dans le domaine public et privé. Ces jeunes femmes manifestent pacifiquement sur le terrain et dans le cyber espace, réclamant leur dignité. Comme l’a dit autrefois le poète afro-américain Langston Hughes :
J’ai autant de droits
Qu’en ont d’autres types
D’être debout
Sur mes deux pieds
Et posséder la terre.
Je me lasse tellement d’entendre des gens dire,
De laisser les choses suivre leur co urs
Demain est un autre jour,
Je n’ai pas besoin de ma liberté quand je suis mort
Je ne peux pas vivre sur le pain de demain
La liberté
Est une semence puissante
Plantée par grande nécessité
Moi aussi, je vis ici.
Je veux la liberté
Tout co mme vous
Dans une société dans laquelle un mouvement indépendant et pacifique pour changer des lois discriminatoires co ntre les femmes est co nçu co mme une « Menace co ntre la Sécurité Nationale », des jeunes femmes co mme Esha, avec sa passion pour la paix, l’équité et l’égalité pénètrent dans une zone peu sûre. Les gens jeunes et enthousiastes sont en effet un atout pour notre monde troublé. Leur curiosité intellectuelle, leur recherche académique, leur passion et énergie sont une source d’espoir pour notre monde perplexe qui est polarisé par les forces du fondamentalisme religieux, la globalisation et la militarisation. C ’est la responsabilité de chacun et de chacune d’entre nous dans les co mmunautés universitaires dans le monde entier et la co mmunauté en général de protéger leur droit à explorer, éduquer et co mmuniquer dans un monde meilleur.
La réalité est que lorsque la démocratie et le respect des droits humains et de la dignité humaine sont sapés, la création d’un environnement qui en co urage l’esprit de recherche académique et stimule la curiosité intellectuelle, qui sont les fondements de la réalisation académique, sont également ébranlés. La dignité humaine, la liberté académique et un environnement en co urageant la recherche intellectuelle étaient un rêve de ma génération qui n’a pas été réalisé et dans les mots de Langston Hughes, ils ont été remis à plus tard.
Et qu’arrive-t-il à un rêve remis à plus tard ?
Dessèche-t-il
Comme un raisin au soleil ?
Ou suppure-t-il co mme une plaie
Une plaie véritable ?
Pue-t-il co mme de la viande pourrie
Ou co uvert de sucre
Comme une douceur sirupeuse
C’est peut-être simplement un affaissement
Comme un chargement lourd
Ou explose-t-il ?
L’interdiction de voyager de Esha est simplement l’expression de l’intolérance pour la recherche académique et la curiosité intellectuelle en Iran. Voltaire avait raison de dire « Il est dangereux d’avoir raison quand le gouvernement a tort. »